La surface inexorable



Tu prends un thé sucré bien infusé avec un nuage de lait et la cuillère dans la tasse fait un tintement censément délicieux (tu n’es plus qu’une sale habitude). Je prends mon café noir très fort très brûlant, sans sucre, je fais le plus de bruit possible en aspirant, impossible d’y tremper vraiment les lèvres encore. Il y a là une vraie discordance sonore. Il y a là une vraie distance si on veut être honnête – tu sais que je fais ça pour toi. Dans cette structure qui se crée, l’espace est coupé en deux, c’est la discontinuité des choses que veux tu, je suis dans ton corps à toi à regarder par tes yeux. Aussi il y a un espion en moi à cet instant précis qui te regarde et qui est sur le point d’agir.
Je jouis d’être un objet étranger à moi-même : ce que je veux désormais, c’est tout ce qui peut survenir pour cet autre qui a pris ma place et dont la solitude ne m’appartient plus. Cet animal entre nous, c’est un outrage à la réalité. Ne m’interromps pas s’il te plait. Je ne suis pas sûr d’avoir envie de te convaincre.
Je te parle maintenant comme si ce n’était pas toi. Je veux te comprendre de fond en comble. Dans le métro tu lis Sade. Ce qui t’étonne c’est une piscine en forme de rein. Tu joues de l’harmonica sans savoir avec ta bouche en soufflant sur un peigne. Si je me laisse pousser la moustache tu n’aimes pas. Si je t’attache tu aimes assez. Ça dépend tu dis, ça peut se comprendre mais tu dois te mettre à ma place aussi et je ne dois pas m’arrêter à ces détails. J’aime ça quand tu pleures par exemple c’est très beau, ce qui me plait surtout je crois c’est tout ce qu’il faut faire pour que tu pleures. Tu n’es pas une fille fragile. Ton corps est considéré comme une porte d’entrée. Mettre le pied dedans en quelque sorte.
Exploiter toutes les situations au maximum des possibilités. Les lumières du tableau de bord clignotent, je cherche la même chose dans tes yeux. Le cuir fondu du siège arrière coule sur tes cuisses comme de la cire noire et épaisse. Les capacités de torsion du volant ne sont pas infinies. La route est un orgasme immense et qui ne s’arrête pas. Les équipements autoroutiers sont les organes d’un corps allongé. Avec méthode nous explorons : lignes blanches, perpendicularités, irruptions géométriques, découpages circulaires de l’espace, embranchements, séparations, tangentes aux plus près, le bitume décidé et brûlant est la peau rigide sous un ciel argent, l’air est irrespirable, des échangeurs soudain, des axes rotatifs à distribution centrifuges et aux bras qui filent vers des dispositions externes, la vitesse et le bruit du moteur, le caoutchouc des pneus au contact, c'est un orgasme impassible, lent, abandonné, et sur toute la surface du corps des objets métalliques lancés à pleine vitesse les uns contre les autres selon un angle d’attaque réputé maximal, ou bien contre un poteau de béton rigide coulé là par des bêtes mécaniques aux bouches hurlantes, des paysages de fin du monde à chaque bifurcation, des zones désertées, arides - ça prendra le temps qu’il faudra, nous tiendrons compte de toutes les propositions, changements de direction, chercher son chemin sur un plan dans un abris bus, et tout ce qui s’ensuit en bord de route.
J’apporte des améliorations au programme sur la moquette épaisse et impropre d’une chambre de motel - les palles du ventilateur au plafond tournent lentement et de manière hypnotique. La fumée de nos cigarettes danse dans la lumière rouge qui clignote de façon imprédictible comme un signal d’alerte subliminal et stroboscopique.
J'imagine aller au bout de tout, ce que tu me demandes et je veux le faire vraiment, fidèlement, honnêtement, totalement. Je veux rentrer dans ta tête et étaler ton cerveau sur le lit. Les murs craquelés de la chambre nous regardent (une certaine idée de l’éternité). Si nous survivons à ça je continuerai certainement de temps en temps à vouloir t’attaquer par surprise du bout du couteau ou bien à tenter de te passer par la balustrade en continuant à t'aimer physiquement jusqu’à ce que je n’en puisse plus. Une autoroute de pureté absolue s’ouvre en deux devant nous.


Bande son idéale: Modeselektor - 20000007 (featuring TTC)

Table pliante sur le parking du désir

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Tu ouvres la fenêtre et le vent fait danser tes cheveux, tu passes la tête au dehors, reviens je dis, c’est dangereux, tu ne m’entends pas, tu veux sentir la vitesse, le vide, l’espace et les insectes qui nous concernent tous, moi je tiens le volant fermement des deux mains, la jambe droite contractée en suspension au dessus d’une pédale mécanique, quand on y pense ce n’est pas physiologique, le bruit du moteur saturé dans les aiguës, la musique dans le poste radio c’est une reprise d’un titre de Katonoma par Kristin Hersh, dans l’abstraction d’une conduite automobile considérée comme évènement cosmique avec son cortège d’aphorismes la route n’est plus qu’une ligne blanche discontinue à suivre à court terme le front bas et les yeux céruléens, il est possible certainement d’arriver à destination sans regarder trop loin, tu attaches tes cheveux avec un élastique et semble t’il dans le même mouvement tu décroises tes jambes, tu es une combinaison de positions possibles comme un rubik’s cube humain que j’aurais voulu pour noël depuis toujours, plusieurs possibilités et une certaine méthode, tout ceci d’une certaine façon me détermine aussi, je réalise que mon corps n’a pas les mêmes idées que moi, en quelque sorte rien ne sera plus comme avant.
Nous avons quitté la ville, plus de recours possible, je te demande si ça t’inquiète un peu mais tu ne sembles pas bien comprendre à vrai dire toute la portée de cette question, ou tu laisses passer par la fenêtre de ta mémoire immédiate, tu oublies le frisson, la peur, la douleur, quelque chose nous contourne, une impression étrange qui passe sur nous, s’éloigne et nous regarde avancer vers elle en ouvrant les bras avec un sourire carnassier, j’ai besoin de réfléchir, j’aimerais voir passer ici des cyclistes futuristes à pleine vitesse qui nous dépasseraient en faisant des appels de phare, quelque chose qui n’existe pas encore, quelque chose d’inimaginable, comment penser à ces choses là ?
Je n’ai pas besoin de sollicitude en l’état actuel des choses tu es la seule chose tangible que je connaisse car tu restes spécifiquement indifférente à tous mes efforts d’anéantissement – tu restes là, tu souris et tu me contiens tout entier, mère pute et correspondante étrangère vaguement distante et protectrice à la fois dans un sentiment délicat et inquiétant de vagin immense et chaud. Dans la substance qui m’enserre tout se vaut, c’est égal, c’est rassurant aussi. Juste vérifier parfois qu’on est encore vivant. La plénitude tue. D’où la nécessité de petits évènements indésirables où frotter son moi - d’où le mur invisible jusqu’au dernier moment dans la brume, d’où le corail sous la surface, d’où certaines réalisations inattendues aussi, là où nous pensions aller et là où nous en sommes, je vois que tu comprends ce que je veux dire, ce n’est pas facile pour toi de répondre, disons que tu es l’évènement inattendu et qu’il va t’arriver quelque chose, tu le sens bien, jusque là nous sommes d’accord.
Le téléphone sonne, c’est un numéro masqué, ça peut être n’importe qui, ou aussi n’importe quoi, ne réponds pas je dis, mieux vaut ne pas savoir certaines choses, tu as l’air inquiète pour la première fois - c’est tout naturel ne t’en fais pas, à cet instant précis je dois te rassurer un peu, je souris sans perdre la route des yeux, et pour cela je pense à toi dans une robe moulante rose fuchsia assortie de collants vert et rose et d'un foulard en soie également vert et rose, on peut tout imaginer avec toi, je t’attendrai à la terrasse d’un café saisi déjà d’une légère érection, je caresserai tes genoux sous la table, je m’allongerai dans le rubis de tes yeux, je mettrai ma langue dans ta bouche.
Dans la chambre d’hôtel je passerai de l’huile aromatisée sur tes omoplates, je te mordrai la nuque jusqu’à ce qu’il se forme une petite goutte de sang perlé, tu fermeras les yeux, tu basculeras en arrière, on oubliera tout ce qui précède. Dehors il pleut, tu aimes faire l’amour en regardant par la fenêtre, tu es depuis le septième étage la petite fille qui donne la main pour traverser, le vieux monsieur sous son chapeau à carreaux et sa maîtresse indécente, une jeune étudiante en école d’art qui donne son corps tous les premiers samedi du mois dans une chambre de bonne de 14h à 19h pour 200 euros à des étrangers rencontrés sur internet et à qui il manque une dent, aussi là bas la femme asymétrique au visage long, jupe plissée noire et chemisier blanc, qui pense à des mains qui la manipulent dans un long couloir sombre en rendant la monnaie à la boulangère…
Pour moi la ville est un corps, la pluie recouvre sa surface d’un brillant lustré de salle de bain. Vu d’ici pour toi la vitre ruisselle, tu fais l’amour avec tous, tout s’écoule, rien ne dure, la chambre est un box au dernier rang dans le parking particulier du drive-in des sens et l’écran est blanc à nouveau. Contrainte contre le cuir vieilli du siège passager, dans le véhicule immobilisé, tes doigts courent sur la vitre embuée puis tu passes la main pour tout effacer. Tu regardes dehors, d’un geste tu oublies, et alors tu me laisses seul avec ton corps, d’un certain point de vue un outil comme un autre dont il faudrait bien trouver l’utilité.



Bande son idéale: Tricky - The love cats

No sleep last night



Il y a une photo que tu as prise et qui me fait du mal, je la regarde lorsque j’ai envie de m’éloigner de toi, je suis heureux dessus parce qu’à cet instant l’idée me plaît, toi tu as le visage caché par ton Nikon bon marché, j’entends encore le bruit du déclencheur, c'est-à-dire le mouvement du doigt et le moment où tu décides de tout figer - la mort, comme ces photos de condamnés qui fixent l’objectif les chaînes aux poings cent ans plus tôt. Autour de nous c’est assez flou et le souvenir je le réinvente sans cesse, ne m’en veux pas, il y a ce reflet dans la vitrine, une enseigne lumineuse indéchiffrable parce que tu bouges et au fond dans le noir je vois là une paire d’yeux qui nous regarde mais tu me dis que ce sont des poussières sur l’objectif. Cette photo je ne la trouve plus elle doit être dans tes affaires (comprendre : ailleurs). Je me souviens de beaucoup de choses, je me souviens que tu dors collée contre le mur, quelque part la peur de tomber c'est-à-dire la peur du vide (c’est aussi la peur du rien), la main sur un tableau de bord imaginaire, le sein droit pigmenté et veineux écrasé contre la peinture blanche, les cuisses emmêlées comme un échafaudage en métal, les lignes qui s’entrecroisent, surfaces planes et pentes, courbes tendues, le corps comme un territoire fictionnel mutant, un module sexuel lancé à vive allure et les projections de ces positions dans l’espace, ombres contre les murs de l’appartement, rappellent le béton nu sectionné par l’acier des pylônes d’une section d’autoroute horizontale et plate vers des villes abandonnées bâties sur les rives d’une mer immobile et dangereuse, laideur abrutissante d’un paysage de consommation industrielle, fils électriques dans le ciel, brefs arcs-en-ciel sous des ponts suspendus, échafaudages en métal, rivières à sec jonchées de détritus, boue craquelée, bâtiments abandonnés dessinant au loin de véritables organes sexuels imaginaires antiques et béants. Dans l’habitacle mécanique, la surface réfléchissante des bordures chromées me renvoie la rencontre de tes cuisses et du volant. Le contraste est obscène entre les courbes arrondies et la rigide structure minérale de l’habitacle. La main sur le tableau de bord sali, le sein droit sur le cube noir de la boîte à gants ou contre le montant de la portière, les cuisses écrasées contre le verre, géométrie au plus près de la substance organique contre la menace minérale. Saillie des crêtes iliaques lorsque tu changes de position. J’observe ces aplats comme une abstraction ou une science sans usage, ton visage projeté contre les parois et les lèvres pleines étalées et déformées sur les vitres qui articulent au ralenti, le corps étiré, vain, perdu d’avance, morceau de roche érodée sortie de terre encore chaude qui écorche un morceau de mémoire profondément enfoui. Sur les bords de ces paysages de traverse gisent des plages terminales, dunes de sables en mouvement qui menacent de tout recouvrir et qui se déversent à l’entrée des villes comme les vagues d’un océan froid et coupant. Les forces qui font échouer ce désert brûlant ne sont pas seulement dues au hasard. Dans les stations service désertes on peut trouver dans les rayons des barres énergétiques périmées et les boxes réfrigérants laissent écouler tout l’azote liquide par en dessous sur le linoléum fondu. Les cartons de jus de fruit sont recouverts d’une fine pellicule de poussière gélifiée. Sur les murs des formes suspendues au dessus des plinthes en PVC semblent rappeler une scène de fin du monde, révélation rigoureuse que les peaux vont exploser et qu’il n’y avait rien à comprendre écrasée contre la peinture. En fond sonore les publicités pour shampoing supplémentés ou pour une conduite automobile intelligente continuent de diffuser par les hauts parleurs alimentés par des batteries solaires. Je suis une machine en squelette animée dans un univers physique, un mécanisme soumis aux variations de pression barométrique et aux forces pesantes de la gravité, aux vitesses limites de transmission de l’information, aux coefficients de déformations particulaires, et aux poids des masses entre les atomes. Je contourne un immense monticule et je retrouve la voiture la carrosserie léchée par une eau délicate de marée stagnante. La trace de mes pas sur la dune qui s’écoule lentement s’est déjà effacée derrière moi, une catastrophe inévitable. La mer vomit ses algues mortes. Nous n’irons pas plus loin. Sur le siège passager sous un soleil de plomb tu remontes ta jupe, un petit bout de kilt plissé sur les fesses. Les vagues font rouler la minuscule Austin Mayfair noire. Nous dérivons emportés par les flots ou le souvenir. Le contact du tissu sur la peau est en soi une performance de paramètres uniques – une distance entre certains évènements et l’évidence de nouveaux rapprochements. L’asymétrie est là, qui nous enlève – une envie de tout déconstruire. Nous sommes les mêmes tu vois, et c’est juste ce qu’il y a autour qui est fini. Rendors-toi. Dans l’hypothèse où tu existes de ton propre fait maintenant que tu n’es plus là à me supporter inutilement, ton visage sur la photo est cachée par ton vieux Nikon et le bruit du déclencheur me semble un peu rouillé - laisse ce n’est rien.

Bande son idéale: M83 - Run into the flowers (Midnight fuck remix by Jackson)

Des raisons d'espérer


Comme d’habitude : on avait rendez vous, tu étais en retard - ce qui ne veut pas dire que tu n’étais pas là, je suis prêt à l’admettre. J’étais aussi en avance peut être, j’évalue la possibilité de discordances dans les brouillis du temps (le souvenir est comme la surface de Solfatare, un volcan plat à sol de cendre et de souffre, et de grosses bulles monstrueuses qui crèvent l’une dans l’autre, regarder où on met les pieds, voir au loin, sentir la tension accumulée rouler sous la terre et dans son ventre, puis exploser au hasard et occulter le silence et la paix d’un monde sentencieux). C’était on ne peut plus simple : tu ne viendrais pas/je ne comprendrais pas. Travailler l’instant. Répétition de la scène jusqu’à distance convenable. Introduire la notion de vrai/faux et d’indétermination concomitante, toutes les réponses sont justes, et tout est possible => La déception est possible. S’en amuser (en se rongeant les ongles et à regarder les passants de travers). Les démons qui m’agitent le crâne sont des êtres de langage. A combattre donc par le langage et c’est pour cela que tu me vois devant toi (pouvoir révélé des mots, alchimie verbale, exorcisme etc…). La dualité, qui est l’esprit du chaos et de ce qui pourrait arriver, veut que tu sois aussi peut-être venue – applaudissements. Tu apparais. Tu es un peu essoufflée. Je m’efforce d’avoir l’air à la fois insolent et digne. Tout est dans le détail – une cigarette que je n’allume pas, une fleur fanée que je bouscule du bout du pied – ça aurait pu être toi ; prendre un air absent, et penser à une peluche usée très drôle, sans yeux ni bouche ni main ni tête – ça aurait pu être moi, et tu danses d’un pied sur l’autre, moi j’ai des débuts de phrase qui me viennent comme ça comme si j’entendais des voix, mais en fait je ne sais pas quoi dire, on se rapproche ensemble d’une certaine forme de pureté absolue un peu ridicule et tu souris – je t’en prie arrête (c’est embarrassant, tu ne devrais pas sourire comme ça tout le temps, je n’arrive plus à penser). Nous ne faisons pas la queue devant le concert de Silicon Milk, mélange africano cubain entre Léonard Cohen et Kraftwek, avec la chanson idiote du bonheur qui ne part plus dans la tête. Lors de la soirée No Party au R, nous n’écoutons pas le set électro-fuzzi de DJ Kuskus les corps rapprochés, les genoux qui se touchent, la sueur sur la poitrine et un verre de vodka grenadine dans chaque main. Le téléphone sonne mais tu ne réponds pas. C’est irrationnel. Nous mâchons mollement les restes d’un animal mort aux veines saillantes dans la chambre aux miroirs du P qui ne ferme jamais, les verres reposés sur un véritable guéridon humain de 19ans, cul tendu, presque brune, talons indécents et dessous Chantal Defuzet. Je suis cérébral mais j’ai mes limites. Nous évitons les regards qui nous reviennent réfléchis depuis toutes les directions – chacune des images inversées des miroirs dans un autre, jusqu’à la nausée, comme après un mauvais trip de Crystal frelaté (ça ne se conserve pas au frigo). Chaque geste, chaque respiration semblent déplacés. Cette nuit est une transgression continue. Nous nous perdons au retour. La sortie c’est au fond, non pas la ligne droite, mais prendre l’escalier en spirale. Dehors, la ville apparaît comme un immense désir à combler quand rien ne suffit plus. Toutes les directions vont vers l’immense appartement sur Seine occupé encore quelques heures toutes lumières éteintes par quelques initiés qui vont se relayer et nous savons tous les deux qui sont ces gens et ce qui s’y passe. Rester subtils. Mais nous ne les rejoignons pas, d’ailleurs je n’en ai pas envie. Je ne veux pas non plus de t’écarter les peaux, ni t’arracher les yeux, je ne pense pas à te mordre lèvres, pour finir je n’ai pas l’intention de lécher quoi que ce soit. Qu’attends-tu de moi, tu demandes? Rien. Tu es vraiment pleine de qualités, j’en ai tout à fait conscience ; j’ai simplement mes défauts. Tu dois comprendre aussi que certaines choses changent/d’autres pas. En secret vois-tu je te hais. On aurait du commencer par là. Ca passera tu sais (des raisons d’espérer).

Bande son idéale : Franz Ferdinand - Do you want to

La ligne discontinue (ne s'arrête pas)


Bien sûr il avait pensé à la quitter mais à bien y réfléchir son corps était une des seules choses dont il se sentait proche dans ce qui lui restait de ce monde, cendres éparpillées sur le dernier rivage, tous échoués par temps clair, une lumière aveuglante, les choses semblaient évidentes mais à bien y regarder rien de tout cela ne se justifiait, il n’y avait plus de cause ni de raison, de la matière en magma brûlant par tous les trous de la terre, des faisceaux déjà formés à encrer/ancrer les esprits, le questionnement du verbe défait par ce qu’on nous en dit, à nous faire croire en des présupposés concrets, tout ce par quoi on est né, ce qui nous attendait là, esclaves d’une volonté essoufflée depuis des milliers d’année, le système est en place et se nourrit du système, avance et invente de nouvelles raisons, et des solutions propres pour le système, et c’est là le choix de l’homme mais lequel ? Qui ? Sommes- nous celui là ? A bien y regarder nous =maladie mentale consentie - symptômes, physiologie, anamnèse, récurrences. Nous sommes la flamme et vous êtes la bougie et nous vous consumerons – ou nous nous éteindrons dans la flaque de ce que vous êtes et alors une autre lumière plus loin. J’avais encore envie de te voir te lever et de sentir ton absence dans le lit, ton odeur sur l’oreiller et les cheveux légers éparpillés sur mon corps comme attestant de la nuit, tu sortirais peut être faire un tour, en faisant le moins de bruit possible, tu as mis ton imperméable et tes bottes, tes yeux sont mal fardés, tu sens les regards dans la rue s’accrocher à ton cul, des mains imaginaires qui viennent par derrière remonter ta jupe fendue, ou peut être es tu là à fumer dans le vide une tasse de café froid à la main à te demander qui je suis au fond, qu’importe j’attends en faisant semblant de dormir à te sentir revenir sans savoir par combien de bouches tu étais passée. Quelque chose s’est déréglé dans l’enchainement causal des évènements comme on saute de wagon en wagon et la suspension entre deux moments du temps qui nous parcourt peut donner le vertige. Le monde et moi ne nous intéressons pas à la même chose. Quel que soit mon style, rester professionnel et urbain, comme on dirait de certaines travailleuses. Ambition d’écrire une histoire à contrarier à chaque page, ou de lire un livre qui déborderait sur le vrai, ou d’imaginer une suite ininterrompue de scènes vidées de la tension d’une catharsis passée sous silence et qui resterait toujours inexpliquée, ce qui est s’approcher le plus d’une tentative d’explication, comme l’intuition du sens. Le lecteur assidu s’en est déjà rendu compte, Sloane et la femme médecin sont la même personne. Toutes les deux ont disparu. Il ne reste rien. Mon ostéopathe porte des espadrilles. Aka Lulu n’interagit plus qu’avec Little Joe, qui feint de m’ignorer. Eric de La Joya est aux Moustiques, quand à Raymond le Dog, c’est toujours le même, ce qui est d’autant plus inquiétant. Tout ceci prend l’allure d’un immense symptôme prêt à s’effondrer. La ligne discontinue des choses ne s’arrête pas. Steve K au Coton Tige se déguise en super héro de la musique séminale 2.0. Envie soudaine d’écrire un livre sur les dérives nocturnes d’un noctambule éthéré dans une ville/cerveau, de confondre le rêve et la réalité, de construire des lignes de fuites depuis chaque proposition du réel à partir de ce que peut un corps et de toutes les possibilités qui en découlent ; envie aussi de déconstruire la notion abstraite de réalité et de prendre littéralement pour un fait acquis ce qui est l’envers du décors – des autoroutes libres, des extases infinies, des univers immenses repliés sur eux-mêmes entre les atomes, des désirs inassouvis, marcher pieds nus dans l’herbe fraîche un soir aussi, les yeux fermés, les bras tendus, la peau ouverte. J’en parle à mon éditrice. J'appellerais ce livre Zéros. Elle me regarde et ne répond rien – est-ce que tu existes vraiment ? Es tu le produit de mon imagination ? Suis-je ma propre fiction ? Ou bien la tienne ?- Assis sur le rebord du trottoir je la regarde s’éloigner, et à la fois je danse le torse nu et des peintures de guerre sur le visage autour du bûcher dans une forêt dense en récitant des chants de tribus disparues, des flammes qui s’élèvent jusqu’au ciel et les nœuds du bois qui explosent, cercle dément qui nous entraîne, une transe agitée, faune et sauvage, les corps qui ne nous appartiennent pas ne sont qu’un véhicule pour les énergies qui vont s’échanger, et dans le taxi aussi de façon concomitante je suis avec elle à lui expliquer tout ce que je suis en ce moment et alors elle met sa main sur ma cuisse et s’approche et je l’écoute en réponse commencer une histoire que pour de multiples raisons elle ne finira jamais.


Bande son idéale: Tiga - Sunglasses at night

Libértés particulaires et diffractions suspendues du réel


Sur le rebords du temps, à regarder en arrière, les mots vont plus vite que le son et la lumière, mais Touffe lui s’en fiche, à hurler dans un micro des onomatopées inaudibles ou des bribes de discours sentencieux incompréhensibles, proto énoncés d’intentions difficiles à qualifier, enregistrant sa propre boucle dans son propre circuit mécanique, une nouvelle forme d’organe à se brancher par l’orifice approprié, sorte de plug and play dédié, et déstructurant la répétition en la disséquant avec ses machines, écartelant les infimes nuances de vibration en disloquant l’enveloppe, les boutons tournés vers les spectres les plus extrêmes, jusqu’à la rupture d’équilibre, nébuleuse de sons dans la possibilité/impossibilité à la fois de ce qui est et de ce qui n’est pas, à exploser continûment, exposé aux météores tombés d’une galaxie langue, univers cosmos big bang et vers quel forme d’outrage sacré nous dirigeons nous ? Un nuage s’évapore dans un autre nuage et dans la déflagration soutenue par l’ascèse répétitive d’une guitare aux cisaillements saturés j’en étais maintenant à chercher ce qui se cachait derrière cette position là, et l’ensemble de tout ce qui avait pu me conduire jusqu’ici. La fumée sur la scène est en stase, les lasers blancs aveuglant tournoient et les volutes prennent forme, puis la dislocation stroboscopique de l’espace par jeu étudié segmente à nouveau le tout et déconstruit ce nouveau plan de réalité. Le vrai devient un moment du faux. Le réel n’est plus qu’une sorte de contrainte formelle et tout se produit en même temps, et la simultanéité est la clé de ce que je suis jusqu’à présent et de tous mes atomes antérieurs, jusqu’à tout ce qui pourrait survenir. Touffe prend des poses de déficient congénital sur son clavier et la grosse veine au milieu du front qui se gonfle nous annonce qu’il va se remettre à crier, une sorte de déflagration qui par reflexe d’anticipation nous saisit les follicules pileux d’effroi. Je repère Sloane dans la foule, un imper fendu très haut, des bas et un long pull, c’est tout ce qu’on peut voir d’ici, le visage très maquillé. Bouquet final, Touffe se propose de projeter sur le public toutes les formes des productions de son corps, et c’est là que j’attrape Sloane par la manche et qu’elle-même se saisit de ses deux Jennifer en larmes, les tympans broyés par la performance, et que nous nous dirigeons vers la sortie : rien que du déjà vu. Au NY, la femme médecin dans le repli confiné sous les arcades montre les veines de son bras en expliquant à un étudiant aux Beaux Arts en costume de stewart l’intérêt poétique d’en passer par une rehab: la flèche d’or, piqure de rappel à la fois du rêve et du réel, et alors prendre le risque de voyager vers la grâce, jamais de nostalgie, c'est comme enfiler des collants neufs, ou une promesse magnifique et illusoire, et qui contient en elle tous les germes de son propre mensonge. Sorrento Siren enregistre chambre 308 de l’ancien Beat Hotel un set expérimental électronique de 78 minutes et trente sept secondes, durée de la séquence apparue en rêve la veille au soir à Jéronimo, 2/3 du groupe, après une séance d’auto hypnose. Chacun sans un bruit crée un univers imperceptible mais réel dans le silence, présence fantomatique en fond sonore. A la Villa, soirée Morsure légèrement appuyée, où des volontaires de tous sexes, enfin des deux sexes, prêtent leurs jugulaires et la nuque aux crocs aiguisés d’un homme long et pâle au visage émacié et aux mains poilues. Corinthe s’approche. Attache ses cheveux et tend la peau délicatement satinée de son cou. Que fait-elle dans la vie ? Elle est nymphomane tout simplement. Slimane lui la saisit délicatement et lui caresse longuement les épaules avant de pénétrer la peau. Il est atteint de porphyrie, un déficit de la saturation en fer dans le métabolisme de ses globules. Corinthe est déjà saisie de stupeur, puis elle se laisse aller en soupirant. L’expérience est concluante, et allongés par terre sur un lit de roses rouges, ils se proposent de la prolonger. Slimane veut mordre maintenant au creux de l’aine, à la jointure des cuisses. Corinthe remonte sa jupe et plisse les yeux. Tous autour, un verre de champagne à la main pour certains, en silence, ravalant notre salive, à regarder au centre du cercle comme si c’était la première fois, ou comme si c’était la fin du monde. Ce jour là, je serai posté au coin de ma rue, les cheveux flottant aux vents de particules, admirant la dernière aube de l’humanité, à attendre la chaleur des 1000 soleils du jour nouveau, le dernier. On saura où me trouver.


Bande son idéale: All rights reversed - The Chemical Brothers

Du dehors au dedans / Symétrie du moment retourné


« Je t’ai attachée contre le rebord d’une sortie d’autoroute en allant vers LaHaye. Il faisait nuit. Tu ne te débattais pas. Tu me regardais avec tes grands yeux, humides un peu éberluée, comme si tu ne me croyais pas, comme si tout ça n’était qu’un film. Très bien je me suis dit. C’est mieux comme ça. Nous voilà libres enfin. – il lit. « La lumière des phares des camions lancés à pleine vitesse passait sur nous comme les ombres d’insectes chargés d’histoires – tout ce qui est révélé là, surgi du noir, et tout ce qui reste à venir. Tu étais le plus simplement vêtue du monde, une petite culotte baggy en coton et un débardeur Université d’Alabama, vert et trop large, trop ample, tes seins révélés par la manche presque jusqu’à la taille, la peau élastique et les aréoles légèrement brunies rehaussées par une morsure récente. Je me suis éloigné et là tu t’es mise à crier. Alors je suis revenu, j’ai caressé tes cheveux et puis je t’ai bâillonnée. » Inauguration des salons particuliers au M dont Eric de la Joya devient ce soir le nouveau conseiller artistique. Grégory Mikhaël poursuit la lecture - il sera question aussi de cagoules et de tenues de camouflage, tandis que La Sybille derrière lui occupe tout l’espace, chorégraphie autorisée collée aux mots, et que Little Joe fait spasmer une certaine idée de la mélodie vibraphonique au xylophone dans le hall de l’hôtel. Mouvements en ordre dispersé, sons décomposés, j’ai l’impression d’avoir déjà vécu cette scène, nourri aux mamelles du temps avec dans le lait un peu du goût d’avant, quelques gouttes aux facultés hypnotiques. A l’Antichambre soirée PartenairesParticulières dans le décor minimaliste d’une salle de bain en aluminium. Sloane en jupe à frange, chapeau en cuir étoilé sur ses boucles blondes du jour, petit bustier noir, épaules nues sans bretelles, et large tutu blanc fourni, dit non de l’index à un chanteur populaire au col amidonné, puis lui fait signe de se mettre à genoux ; dans l’espace qui se crée, c'est-à-dire le possible immédiat, elle le tiendrait pour nous en laisse. Jennifer s’approche et caresse la bête imaginaire. L’autre Jennifer tient les verres. On retrouve Aka Lulu à la soirée Party-me organisée par le magazine Ozone Free, des sosies illustres, des journalistes branchés, des montures en écaille, de l’hélium en bouteille. Raymond le dog cherche la beauté dans les interstices du réel et dans les failles du temps, partout où soudrait le mercure. Plus tard Nataliana ne me répond pas quand je l’appelle, la boisson du soir est une délicate vodka brune aux herbes de l’Oural, on a parfois envie de s’arracher les peaux, et de brûler de l’intérieur d’un feu à la fois lumineux et sombre, mais rien n’est vrai n’est-ce pas ? J’ai déjà vécu ces moments. Dans quelques instants, BernieM va surgir accompagné d’une magnifique islandaise et parler espagnol avec un albinos appelé Juan. Au BC, le long du long couloir à la lumière électrique et bleue, Vicky surgira d’un temps que nous ne connaissons pas encore, m’attrapera par la cravate EnricoMüller et ébouriffera mes cheveux en soufflant sur mon visage et derrière mes lunettes - j’aurai de la buée sur les verres. Tout n’est plus qu’une immense boucle, choisir un axe de symétrie concret autour duquel nous tournons tous et regarder devant soi. Dans le taxi qui traverse la nuit, immobilisé dans les ruelles à sens unique par le camion poubelle qui encore ce soir sera le messager de l’aube, je cherche à me souvenir du moment décisif, où j’étais transpercé de l’émotion la plus vraie, devant vous pour la dernière fois, avant que tout ne soit par la suite que la répétition de ces instants ou la recherche avec autrui du retours de ces moments là. Dans la pureté. Vous seule m’avez connu. Le moment retourné. Ah pardon c’est gênant. Vicky abandonne sa position de neutralité et en posant sa tête sur mes genoux elle me parle d’un cœur situé à l’intérieur du ventre et qu’il faudrait atteindre par tous les moyens dans une langue qui roule les R. Consommer la peau. Du dehors au-dedans. Orientations du corps, préférence, inclinaisons, soumissions diverses. Révélations inattendues. Etais-tu telle que je te voyais ? Parfois de l’extérieur je t’observais à l’intérieur, et encore j’échouais à savoir la véritable substance dont tu te composais quand je n’étais pas là.


Bande son idéale: Daft Punk - Technologic (Vitalic Remix)

Structure échos et reflexions par tous les uns

La frontière pointillée entre les espaces définis s’efface dans la nuit. Ce qui disparait c’est une certaine forme de mémoire immédiate, consentie, structurée par le grain visible du jour, les mises en place, les formes, les couleurs, les visages et l’ensemble des décors d’un système qui, si l’on commence à remettre en cause ses présupposés, se tapit dans les coins et manque alors à l’appel - le tissu conjectural se distend puis se retrouve et se heurte à lui même, plisse et se ride, il pèse maintenant par son centre et s’effondre, aspiré et poreux : il s’écroule. Alors percer le rideau par une nouvelle forme d’intuition qui saura tisser des paysages par exemple avec des couleurs et les variables combinatoires de certaines suites mathématiques, déterminer la métastructure reine et faire allégeance au chaos comme seule force décisive et qui prédispose à la gravité et aux magnétismes. Des molécules en flux qui s’affrontent aux récifs du vivant, comme sels oxydants sur les structures carboniques. Analogie mentale contre univers physiques. Sloane, bas résilles et smoke eyes, traverse le plan cosmique et s’allonge sur la table mal essuyée un verre de Gin-Martini-Olives à la main. Retours à la P ce soir pour l’anniversaire open bar de Jean Biton. Les deux Jennifer se tiennent affectueusement par la taille, et Little Joe est le messie intergalactique d’un monde qui n’existe que dans son imagination. Les lieux ont une mémoire, et entre ces murs qui nous ont vu passer souvent, chacun sent en secret une pointe de nostalgie glacée lui tourner dans le ventre avec délice – c’était il y a quelque semaines, nous avons décidé de ne plus revenir, car personne ne savait plus dans ce repère branché qui était censé imiter qui et qui devait s’en offenser. Marijane est dans un coin du bar à étonner tout son parterre à la description d’une soirée particulière avec ses deux Vladimirs. Près d’elle, il me semble reconnaitre Raymond le Dog, chemise à fleur Yushia Milie, bretelles colonel, petit gilet en satin vert moulant et jean taille très basse à ras sur les chevilles, découvrant de petits escarpins marrons à bouts limés, mais quand je lui fais signe, il semble un instant me reconnaître puis se ravise. C’est que juste à côté de moi, derrière ses lunettes à verre réfléchissant Yuritone, sous un chapeau gris à carreau égayé d’une marguerite artificielle, polo Ralph Muren jaune uni, pantalon à lanières et bottines en daim vert d’oie, le véritable Raymond le Dog lui fait face avec insistance dans une position de force muette, prêt à bondir à la gorge et à serrer à la moindre tentative d’approche. Je regarde autour de nous. Orion, véritable avatar et virtuel circonstancié métastasé dans mon cerveau, s’en tient sans dire un mot à l’éthique de Star Wars, reproductible et fiable, force pure contre côté obscur, mais cela manque assez de subtilité en ces circonstances. Eric de La Joya insiste à l’oreille d’une portoricaine au corps apparemment vibratile, quelques grains de sueur perlés qui épousent chacune de ses formes et dont le corps s’alanguit en retours : leur descendance pourrait être l’enfant stellaire. A quelques mètres de là, derrière des montures en écaille et le regard élancé dans le vague comme une poignée de main molle, les rares cheveux éparpillés sur un crâne lustré au plus près, une cravate rouge sur une chemise à carreau épaisse, un gilet de laine tricoté main et des pantalons en velours côtelés, préfiguration certaine d’une mode à venir, seuls les traits du visage varient mais les ressemblances de forme et d’allure font des deux Eric de la Joya chacun le clône de l’autre. Je me sens épié. Un verre de Vodka grenadine à la main, tricot de peau Brigitte Fwkjy, bracelets tressés sur tout l’avant bras, le cheveux humide ou bien gras et la barbe taillée à la serpe, le regard vitreux qui me fixe, col remonté d’un ample pardessus Paul L’oto jusqu’aux oreilles, collants de laine noire sous un short en jean baggy et bottes marrons dépareillées, c’est celui qui semble être le sosie à moi dédié – même si je suis quant à moi parfaitement épilé du visage et du corps depuis la veille, costume à coudière Giorgio Cavole au plus près du corps, chemise à jabot, lunettes volta, cheveux parfaitement peignés et ongles manucurés, petits souliers à boucle vernis enfin, à talons moyenâgeux. Partout tout autour, des clones qui nous ressemblent et que chaque soir nous évitons de croiser, dont l’existence singulière avérée rend la nôtre précaire. Comme nous ils ont les intestins fragiles. Comme nous ils sont cette nouvelle sorte d’aristocratie par filiation et affinités subtiles, habitués aux mets les plus fins. Comme nous ils décident pour d’autres de l’espace et du temps. Mais quand nous dînons avec Philippe Garec, ou bien avec la nièce de la voisine de Luc Besson, ces prototypes dupliqués passent un week end sous les tonnelles en pays Lubéron avec Scarlett et sa sœur, ou se font réveiller en pleine nuit par Cloé S en pleine rupture amoureuse. Si bien que si nos aires d’influence sont les mêmes, la question qui se poserait et que nous fuyions en quittant la P au plus vite serait de savoir véritablement qui se réfère à qui. Personne pourtant, car la nuit est un espace ouvert, et là comme ailleurs on n’est pas sûr vraiment de n’être pas plusieurs. Rares apparitions, la grâce elle est unique, qui disparaît sitôt qu’on s’est approché, drapée parfois dans rideaux de pluie, comme on a des débuts de phrases et on voudrait qu’elles ne finissent jamais. Un corps certes, mais aussi les combinaisons du possible associées. Souvenirs alors, mémoire étendue qui traverse les plans, un relargage récurent et lent. Préciser goût et singularités de chacune des parties. La réverbération en écho de ces petits évènements mentaux est un processus que je n’explique pas, mais saurait on tout expliquer.


Bande son idéale: Tahiti 80 - All around (Yuksek remix)