Nuit blue néon fumée



On se retrouve comme d'habitude à la table du fond en train de siroter un gin vodka quatre olives ou bien un mojito coco. Sloane est New Yorkaise ce soir, elle porte son fuseau rose flashy et pied de poule antisocial, ses cheveux sont gras, ses yeux lourdement maquillés de khol, et le rouge de ses lèvres tire sur les aigües, une des deux Jennifer qui l'accompagnent en essuiera le bord avec une petite serviette carrée R Club. Sono basse pression à l'heure de commencer la soirée, Timide Ohara et Vleria Suicidal Club s'enchainent aux platines, sorte de mélange de rock tzigane berbère et de minimalisme allemand mais venant du Danemark. Michel Michel rentre de sa tournée promotionnelle au Japon, et il en a profité pour faire un reportage photo sur ces kids qui pêchent dans le métro de Tokyo et sur les âmas. Vernissage pour tous, ce soir encore nous sommes neufs à nouveau et dix à ouvrir les portes de la galerie LH pour prophétiser la mort du concept et l'avènement d'une nouvelle ère post consumériste à tout prix: la sandalle comme étalon de représentation. BabylGirl estampe chaque oeuvre d'un "Approuvé" ou "Non approuvé", on a rendez vous chez Little Joe dans l'est. Dans les taxis, conversations au choix sur les bienfaits d'une irradiation à petite dose au long cours comme mithridatisation ou la façon de bien extraire son grain de peyolt. Jim nous rejoint, il revient d'une quête de vision à l'ayauascua en pays basque, et ça me rappelle qu'en cas d'abduction, la seule chose qui est vrai, c'est la douleur des sondes dans le corps - tout le reste n'est que poésie. Retours à la réalité, Little Joe finit sa pizza quatre fromages, sa copine a les pupilles dilatées mais elle dit ne prendre que de l'amour en doses, dans les WC le mur blanc monochrome est traversé par le mot Hémoglobine en lettres rouge sang. Little Joe compose d'étranges cocktails sirupeux à base de fruits inconnus, et nous propose de mélanger nos fluides dans le shacker mais il est l'heure. Little Joe s'habille alors, réalisant qu'il est nu, et dehors le froid nous plaque contre le mur pour une fouille au corps. Dernier passage au Carmina avant de passer la foule pour l'entrée du SV, où DJ Truisme manque de s'arracher un oeil en voyant Sloane sculpturale se hisser jusqu'à lui pour lui demander de passer les Mohicans, private joke délavée et que personne ne pourra partager, mais Truisme n'entends pas, enlève son casque d'une oreille et penche sa tête sur le côté, et apparemment souffre d'apraxie relative puisqu'il s'enfonce la paille de son soft drink dans l'oeil droit. Sloane est déjà loin sur la piste, elle transpire et tous ont envie de frotter cette peau avec sa peau. Dehors la nuit vaporeuse bleue néon fumée encourage les originalités affectives. Nos vies et nos actes dans le secret échappent alors à toute logique explicative. Jusqu’au matin la lumière de la lampe de chevet près du lit se refléte dans le miroir, diffractions lumineuses ondulatoires sur la pâle pelure rigide et stratiforme du réel. Adjoindre une infinité d’éléments conjugués à la scène.



Bande son idéale: Intergalactic - The Beastie Boys