L'inconstante volumétrique


Tu ne donnes que peu de prise, les évènements glissent sur ta peau et n'osent pas te toucher, tu tolères mes interruptions quand je te coupe la parole, tu es volontairement éparpillée, tu penses à beaucoup de choses en même temps sans vouloir mener rien à terme, tu n'as pas de noyau central, tu n'as pas de poids, tu n'as pas de masse plutôt car la gravité s'applique à tout et même à toi, une force indéniable et plus rapide que la lumière, et qui lie tous les évènements d'un bout à l'autre de l'univers de façon immédiate et sans recours possible, si je ne te connaissais pas tant je dirais volontiers que tu es vaporeuse, ou plus encore, irréelle, c’est simple en fait tes parties sont détachées, elles fonctionnent toutes pour leur compte, tu as trouvé là un système original et ça marche, mais si c’est applicable pour toi, ce n’est pas forcément reproductible, comme il y a plusieurs façon d’aimer il n’y a pas qu’une seule façon d’exister, tu nies avoir une personnalité, c'est très étrange, tu prends des décisions sans réfléchir et tu ne te trompes que de peu, toujours mais presque, tu es adaptative, tu es une fonction de survie permanente, tu te définis par tes actes et non par ce que tu crois en penser, qui vivra verra tu dis et tu laisses aux autres, donc à moi le soin d'observer, de peser, d'évaluer, de discourir sans fin sans but et sans solution sur ce que tu es, toi tu t'en moques, tu es une idée que je me fais, tout change avec toi à chacun de tes gestes, quand tu fumes tes Camel en levant le bras pour laisser s'échapper la fumée et ne pas gêner les voisins, ce qui m'intéresse alors c'est la grâce de l'élongation dont tu disposes, c'est l'espace que tu redéfinis, c'est la spécificité de ce mouvement là qui n'appartient qu'à toi, ça c’est toi, et en même temps ce n’est pas suffisant mais c’est la définition la plus exacte de toi que je peux apporter, tu continues de me parler le bras au dessus de la tête et c'est tout naturel, ta main retournée la paume ouverte vers le ciel pour l'équilibre mais aussi pour la beauté du geste, c'est la conscience d'une certaine forme de beauté qui ne se nie pas, disons que tu sais des choses qui passent par toi sans y réfléchir et que je vois mais sans avoir plus le courage ni l'envie nécessaire pour les interpréter, je fais comme toi je m'en moque. On ne va pas se quitter de la journée, je réalise que t'attraper par la main par la taille ou par le col c'est différent, tu as une fleur artificielle dans les cheveux, tu fais ton nœud sur le côté, j'ai des filaments de ton écharpe entre les dents et sur les lèvres, j'essaie de voir ce que tu vois pour te vivre de l'intérieur ou pour me vivre moi depuis toi. Tu portes des mi bas sous ton pantalon court, dans tes baskets noires à rayures, ou un tutu blanc de danseuse avec des leggins noires, entre les deux il y a tout ce que tu es : quelques accessoires, un choix de couleur et de tissus, tous ces vêtements éparpillés sur le lit qui ne prennent sens qu’une fois assemblés, sur ton corps. C’est là que je te comprends mieux : il y a toutes ces parties de toi que j’explore séparément et sur lesquelles je mets les mains, je ne suis pas en train de te baiser mais comme tu l’exiges j’attrape tes poignets, je lèche tes seins et je mets tes jambes sur mes épaules : c’est un point de vue sensible, car tu demandes à ce qu’on s’occupe de toi pleinement, c'est-à-dire séparément. C’est là que tu te retrouves tu dis, quand toutes ces unités disloquées se rejoignent à l’instant crucial où tu te cambres et où tes reins ne t’appartiennent plus, c'est-à-dire si j’accomplis bien ce que tu attends de moi : là tu t’oublies dans ta globalité. Avoue que ça t’excite. Je suis une drôle d'histoire pour toi, j’ai un passé qui s’efface, j’ai un présent qui m’échappe et je n’ai pas d’avenir. Toi tu es là et ça te suffit. Tu es un pantalon déchiré à la surface d’un océan, pour toi je rêve de profondeur et d’immensité. J'aimerais ne jamais t'oublier car tout a une fin.




Bande son idéale: Passion Pit -I've got your number