Petite nécessité


Ce matin, ou passé midi déjà, interview pour le magazine Espagnol underground Maraca de Sorrento Siren en terrasse d’un Costes du VIIe. Tout se passe bien. On veut des nouvelles de Paris, on va en avoir, et du très frais. Tout à coup, vibration/déflagration dans la poche arrière : c’est mon mobile, un combi Dior glané à la soirée VID de fin d’année, noir et mat ; on m’appelle mais je déteste entendre la sonnerie. Rendez vous chez RLD en début de soirée à l’heure de l’apéritif. Ne pas oublier les olives. On s’y remet. A l’heure dite, à l’endroit prévu, alors que j’avais passé mes bottines beiges à semi talon pour l’occasion, chemise bordeaux à carreaux gras, petit débardeur effilé gris clair en dessous et par-dessus son gilet assorti, jean extra slim surpeint, quelle ne fût pas ma surprise : c’était un traquenard. Je mets quelques minutes à réaliser. Ulcéré Michel Michel se plaint d’une atteinte à la liberté. Je vois. On aura donc finalement lu bien attentivement tout ce que disait la grosse souris. Est-ce ma faute moi si son chemin de vie n’est pas exempt d’observations délictueuses ? Sans rire, je ne raconte pas tout, et je m’abstiens par exemple de parler des compléments stéroïdiens qu’il se fait immiscer en suppositoire quotidiennement par une masseuse asiatique pour rester cette année encore jeune. Raymond Le Dog s’exprime: je dois confondre, il ne se souvient pas avoir été une seule fois ces derniers jours dans un état aussi corrompu, comme un disque dur grillé dans le fond éventré d’un vieux PC. C’est bien là le problème, mais je peux facilement lui citer les situations que la décence m’interdit d’aborder ici, et rien qu’à considérer l’état de ses muqueuses les plus apparentes on se rendra compte que je n’ai pas tant exagéré. Sloane ne décroche pas une seule parole mais ses regards en disent long. Pas de langue de bois. Ce n’est pas son genre. Elle ne veut pas être mal jugée. Les deux Jennifer prennent des poses alanguies. Tues et coites. Mais de quoi parlons-nous? Certaines œuvres sont une voix qui montre la voie, et les auteurs sont branchés sur une énergie intuitive, sensation, prémonition, ce qui touche à l'essence même de l'âme mais qui échappe quand tu approches les doigts, comme sur un flux de pensée par intermittence, le curseur se déplace, dans le parasitage un message clair éclair apparait, et qui laisse sa trace en sillons. Prémonitions parfois, et toutes les lignes sont à lire comme la marque possible du destin. Changer le monde avec des mots. Le vrai contemporain sait d’ailleurs bien cela. Et mes amis, je le répète, toutes vos nuits sont nos nuits à tous. Passées, présentes, virtuelles ou futures. On entre dans le vif du sujet. Comme en quelque sorte un cœur amené sur plateau d’argent, palpitant, vibratile, un instrument à vent si on souffle dans ses tuyaux humides mais pas trop fort car c'est un système circulatoire et ce qui va revient, aussi bien fouiller des doigts au fond des cavités au préalable, mais ne pas confondre trabéculations et tapis sensitif, car les replis ont une fonction expansive, paradoxalement, et plus petits ils se composent et plus ils contiennent ce qui à la fin finit par faire deux ou trois stades en aire. On conclut que tout ceci est nécessaire à la mise en perspective du concept même de nuit. En clair, on va finir par rater le fameux et très prisé mix de Shinowsky au R. Dans le club, une brune très joliment faite, tee shirt Mickey nu exhibitionniste et de fausses oreilles de souris en serre tête, un petit minois très mammifère et un ridicule short vintage qui ne fait que souligner la plasticité parfaite de ses cuisses : elle cherche peut-être à attirer mon attention. Je m’approche mais Slim R. aka Aka Lulu me barre le chemin et me demande en me parlant si près que je prends d’un coup 0.2 g d’alcool par litre de sang de le décrire comme un personnage mystérieux, un homme loup de la ville, qui rôde dans les étages et qui gratte à la porte, à la recherche d’une proie docile à la peau souple. La souris a disparu. On retrouve une ancienne miss météo, qui en devait beaucoup à ses charmes et à ses capacités physiques adaptatives hors du commun, en faisant la queue devant les WC occupés. Porte fermée, on perd patience et SdS s’accroche à sa jupe. Dehors, elle retrousse son tissu sur ses deux jambes immenses entre deux voitures. Puis elle voit au loin un arbre. Elle a l’idée de s’approcher, mais elle s’arrête en chemin, saisie et glacée, car elle voyait alors ce que personne ne soupçonnait, et cet arbre en retours nous regardait. Une musique au loin, c’est l’homme aux arbres, et il joue du pipeau pour le règne végétal dans cette nuit glacée, et quand il nous voyait avancer, il s’interrompait. Là d’où il était, d’où nous allions, il revenait. Sloane a filé avec DJ Aïkido qui la cherchait dans la ville depuis trois soirs. On se retrouve avec deux Jennifer désireuses de contenter tout le monde. Ca tombe bien : ma plante en creux attendait qui viendrait l’arroser. Vue de l’esprit maligne et dure à résumer.


Bande son idéale: Mr Oizo - Positif